Né de la Pierre. C'est du moins ce que racontaient les légendes de son peuple, pourtant, autant que s'en souvienne Thrór, il était bel et bien né de la chair de sa mère. Deuxième fils de la famille Kazadrin, son ascendance faisait de lui un membre de la Caste Guerrière. Tous les membres de sa famille, sur plusieurs générations, étaient, par droit de naissance, jucher dans cette même caste. Bien sûr, il y avait des branches qui s'éparpillaient dans des castes inférieures, mais sa branche à lui, la branche principale, n'avait jamais failli au maintien de sa noblesse. C'était un lourd héritage qui reposait sur les frêles épaules du jeune nain. De sa fratrie, il fut toujours le plus turbulent, le plus prompt à la bêtise, le sang ancestral de mille guerriers coulait dans ses veines, indomptable.

Dès qu'il fut en âge, il apprit les us et coutumes de son peuple ainsi que son histoire, apprenant à lire et à écrire, mais à compter aussi. Pourtant, il fut un élève difficile, distrait, les dogmes de son peuple l'intéressaient bien moins que le fracas du fer et le chant des lames s'entrechoquant. En parallèle à son éducation intellectuelle, il était de rigueur que chaque enfant issu de la caste des guerriers suive un entraînement martial complet dont l'aboutissement visait à en faire un brave défenseur du peuple nain. Thrór ne dérogeait pas à la règle et appréciait même cela, bien que l'entraînement fût dur et éprouvant, il démontrait un talent au combat proportionnellement inverse à son talent dans les arts de la lettre et du chiffre.

En vieillissant, Thrór resta le même, plus doué à s'exprimer l'arme à la main que par des mots. Toutefois, il avait mûri, passant de l'âge d'enfant à l'âge d'adulte, mais restant éperdument espiègle et querelleur, prompt à s'attirer des histoires qui se réglaient souvent dans la Lice. Combattant enjoncé dans son armure frappée des armoiries familiales, sa fidèle épée à la main, couvrant le bruit de la foule de ses éclats rieurs, appréciant la saveur d'une bonne bagarre, il défendait son honneur avec vigueur et adresse, puisant dans son talent inné de bretteur davantage renforcé par un entraînement incessant d'année en année.

Si les rouages du combat en Lice n'eurent bientôt plus de secrets pour le jeune nain, il n'en était pas apaisé pour autant. Thrór cherchait davantage que cela, il voulait acquérir plus d'expérience, plus de savoir, mais surtout, il se demandait à quoi ressemblait un véritable combat, un combat déloyal où la survie prime, loin des acclamations de la foule, loin de la gloire qu'apportait la victoire. C'est alors qu'il se tourna vers les combats illégaux et dans ce milieu, il y avait deux sortes de gens : les parieurs, qui misaient de l'or sur la victoire ou la défaite du second genre de personnes, les combattants. Les combattants, eux, gagnaient une partie de la mise ou perdaient la vie, nulle autre alternative n'existait. Thrór devint un combattant, mais l'or ne l'intéressait guère, il aspirait à combattre un adversaire rusé, qui n'hésiterait pas à lui planter son arme dans le dos si jamais il avait le malheur de se détourner de lui.

De plus en plus rompu à l'art du combat de circonstance, Thrór perdit peu à peu l'attrait du combat qui le caractérisait, mais un évènement ranima bientôt cette ardeur : Le monde des combats illégaux profita de sa popularité croissante pour organiser un nouveau genre combat à deux contre deux, mais Thrór n'avait pas de partenaire. Toutefois, il avait une idée bien arrêtée sur la personne qu'il lui fallait, une seule personne possédait un talent égal au siens : son frère aîné Roran. Avec force persuasion, il réussit finalement à convaincre son frère de se joindre à lui pour le combat, mais le soir venu, les choses tournèrent mal et la garde découvrit ce qu'il se tramait, arrêtant toute personne présente sur les lieux, Roran et Thrór y compris. Enfermé dans sa cellule, Thrór ruminait son amertume d'avoir conduit son frère en prison, pire encore, d'avoir sali son honneur et le siens, celui de toute leur famille. Les choses tournèrent encore plus mal lorsqu'on lui annonça que son frère avait tout avoué et qu'il avait juré l'innocence de Thrór, s'accusant à sa place de crimes qu'il n'avait nullement commis.

Thrór connaissait les lois qui régissaient son peuple, il savait qu'il n'y avait que deux options pour son frère : l'emprisonnement à vie et le déshonneur ou rejoindre la Légion des Morts et recouvrer un semblant de dignité avant de mourir sans jamais revoir les siens. Encore mieux que les lois d'Orzammar, il connaissait son frère et il savait quel choix il ferait. Si la culpabilité rongeait Thrór, il assista néanmoins aux funérailles de son frère et lui fit ses adieux avant que celui-ci ne rejoigne les Tréfonds, comme le voulait la loi de la Légion.

À la suite de ses évènements, Thrór se confina, se renfermant sur lui-même, la flamme qui animait jadis le jeune nain s'était éteinte en même temps que la promesse de revoir un jour son frère. Les mois s'égrainèrent les uns après les autres sans que Thrór ne sorte de la catatonie dans laquelle il s'était lui-même plongé. Toujours rongé par les remords et incapable de vivre dans le mensonge, de jouir d'un honneur qu'il ne méritait pas, ou plus, il quitta Orzammar à son tour, ayant un but bien précis en tête pour se repentir de son crime.

Abandonnant sa vie passée et son identité, il remonta à la surface, ne se faisant désormais plus connaître que sous le nom de Thrór, il n'emporta avec lui que son épée, laissant le reste de ses biens derrière lui. Désormais, il ne serait plus considéré que comme un paria par son peuple, destitué de sa caste, de sa noblesse, il n'était rien, voir encore moins que cela. La route jusqu'à la Forteresse de Churneau fut longue et éreintante, mais Thrór jugeait que c'était une mince punition pour avoir laissé son frère s'accuser à sa place. Enfin sur place, il se porta volontaire pour rejoindre la Garde des Ombres, conscient que cet engagement le liait à vie avec la Garde, même s'il ignorait encore à quel point.

Au sein de la Garde, Thrór redevint peu à peu le nain espiègle et farceur qu'il était jadis, même si au fond de lui, quelque chose restait brisé, il avait retrouvé un semblant de dignité, une dignité qu'il puisait en se disant que ce qu'il faisait était juste, honorable. Au bout de quelques semaines, il participa au rituel de l'Union et partit avec les autres recrues donner la chance aux Engeances, si certains périrent dans l'exercice, ce ne fut pas le cas de Thrór qui tua sa première Engeance en séparant le tronc de celle-ci de ses jambes avant d'en récolter le sang, mais ce qui attendait les survivants après cela était encore bien pire.

Lorsque la nuit tomba ce soir-là, un vétéran de la Garde fit appeler les recrues dont Thrór pour pratiquer l'Union. Si certains tentèrent de s'enfuir, d'autres moururent durant le processus. Lorsque ce fut le tour de Thrór, il hésita un moment, mais résolu, il but le mélange de sang et de lyrium. Une douleur fulgurante l'assaillit après avoir ingurgité l'immonde mixture, lui saillant de la poitrine jusqu'au crâne et il s'effondra, inconscient, en proie à d'étranges hallucinations. Lorsqu'il se réveilla le lendemain, encore engourdi et nauséeux, Thrór fut forcé de constater que peu des recrues avaient survécu à l'Union, mais il en faisait néanmoins partie, désormais, il était un Garde des Ombres.

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✥ [i]aidan turner[/i] - <span style="font-size: 10px;">[url=http://chroniques-de-thedas.forumactif.org/u81]THRÓR KAZADRIN[/url]</span>