Les routes d'Orlaïs.

Il quittait Val Rayeux... enfin! 15 jours d'un ennui sans nom! Depuis tout jeune, sa famille l'avait éduqué au Jeu, cela faisait partie des prérogatives de tout noble, que de savoir le pratiquer. Mais que c'était ennuyeux. Il n'avait jamais aimé cette activité qui n'avait rien d'un jeu. Tant de conséquences dramatiques, aux répercutions terribles, étaient nées de cette pratique. Du coup, il faisait son possible pour se distinguer par un détachement sombre: Yver se positionnait avec son intellect et son savoir, non avec la flagornerie et les bons mots. Du coup, on le disait froid, distant et représentant dignement le pays de Combrelande. S'ils savaient...
Né dans une noble famille du Duché de Combrelande, le jeune Yver avait tenu sa première arbalète dès l'âge de 6 ans. Une découverte formidable pour lui. Il appris le combat... et il apprit le Noble Jeu. Hélas, il se passionna surtout pour la science. Ça, au moins, c'était utile.
"Hélas" car il ne trouvait aucun intérêt, aucun amusement au Jeu. Trop de conséquences, bien plus de gens impliqués que ce que ces nobles pensaient.
Du coup, Yver se contentait d'assurer sa position, préférant ne pas s'impliquer plus. Un Jeu défensif, somme toute. Il arborait un style direct, détestant les compliments exagérés et ceux qui ne vont pas directement au fait. Mine de rien, cela marchait: l'un des buts du Jeu était que l'on parle de vous, que l'on jase à votre sujet: on parlait de lui quand il apparaissait. Il s'en moquait... tant qu'on ne franchissait pas la limite de l'inacceptable.

Lorsque le carrosse noir rehaussé de bronze s'arrêta, sous une pluie battante, à quelques lieux de la capitale de l'Empire Orlésien, une forme encapuchonnée monta à bord.
La femme enleva sa cape trempée avant de s'assoir. Elle observait le noble masqué de bronze et d'or qui se tenait devant elle. Son visage se reflétait dans le masque qui agissait comme un miroir.

Yver retira le masque. La jeune femme en un air amusé:
-Alors? Tu t'es régalé, Yver?
-Je me suis ennuyé comme un rat crevé! Une horreur! Mais enfin, qu'est-ce qu'ils trouvent d'amusant à cette mascarade?
-Le Noble Jeu est une institution séculaire. Tu te dois de t'y plier et....
-Arrête, Natalya. On croirait entendre mon grand-père! Une purge séculaire, oui! Bon sang. une saleté de baronne m'a tenu la jambe pendant au moins 2 heures, tout à l'heure!
-2 heures à vous supporter, toi et ta légendaire rectitude, ta terrible bonne heure et ton verbiage kilométrique? Un exploit sans égale! Hey! Un  mariage en perspective?
Yver sursauta d'indignation:
-Ça va pas, non?
Natalya éclata de rire. Oh qu'il détestait qu'on lui parle de ça!
-Bon... En tous les cas, c'est fait: le Baron de Frangère n'a plus d'appui haut placé... mais il ne le sait pas encore.
-Très bien. Contacte Heren. Qu'il l'inhume. Ce sale type m'a assez couru sur le haricot. Cette rumeur comme quoi j'ai fait assassiner mon père m'avait passablement énervé. Et en plus, il se permet d'envoyer un barde pour tenter de me tuer, là, c'est le genre d'actes putrides que je n'apprécie pas du tout.
-Tu connais des gens qui apprécient ça, petit frère?

Natalya était la seule à l'appeler ainsi, même s'ils n'étaient pas frère et sœur de sang. Elle était roturière, orpheline, fille adoptive du secrétaire particulier du père d'Yver. Ils avaient grandi ensemble, lui, elle et le frère aîné d'Yver, Gérald. C'est d'ailleurs lui qui devait reprendre la baronnie, mais la Garde des Ombres l'avait recruté, propulsant Yver comme hériter direct de la Baronnie de Kaflan.
Yver avait 17 ans lorsque son père était mort d'une grave maladie incurable. Sa mère le suivit quelques mois plus tard, se laissant dépérir par le chagrin, malgré l'attention des siens.
Gérald, de 6 ans l'aîné d'Yver, devint alors Baron de Kaflan. Cela convenait à Yver qui se consacrait pleinement à la science et intégra l'Université de Val Rayeux. En général, les jeunes nobles y passent 3 ans, Yver y passera 5 ans, se spécialisant dans la physique mécanique et les mathématiques, touchant aux autres domaines. La première année fut un deuil mais aussi un épanouissement, pour lui.
Les suivantes furent difficiles: au bout de cette année, Gérald fut recruté par la Garde des Ombres. Yver revint un temps pour prendre sa charge, et fut victime de sa première tentative d'assassinat. Il fut sauvé de justesse par Heren, avec qui il se liera d'amitié.
Une fois ses intendants déterminés, il retourna à Val Rayeux poursuivre ses études, ne retournant sur ses désormais domaines que lors des fins de session afin de voir si tout allait bien.
Il était heureux de voir sa "grande sœur" reprendre du poil de la bête et rire de nouveau. Gérald était mort lors d'un combat contre les engeances 4 ans auparavant. Le Frère d'Yver et Natalya étaient amants et, lorsque le Garde des Ombres mourut, Yver fut doublement frappé: par sa propre tristesse et par l'effondrement de son amie d'enfance. Il avait peur qu'elle se laisse mourir, comme sa mère l'avait fait quelques années plus tôt mais, petit à petit, elle arriva à refaire surface.
Elle était sa barde, formée pour le seconder, fidèle à sa famille, et donc à lui, vu qu'il était désormais le dernier des Kaflan, avant toute autre personne. Mais, au contraire d'Yver, elle adorait le Noble Jeu. Elle y était experte et le conseillait souvent lorsque certains détails pouvaient échapper au Noble... et elle était sa seule famille.
Elle ne comprenait pas qu'un esprit vif n'apprécie pas le Jeu. Il jouait contraint et forcé parce qu'il n'y voyait vraiment aucun intérêt. Elle avait échoué dans le fait de lui faire apprécier cette activité. Après tout, le Jeu est comme la science et l'invention: un défi. Peut-être Heren avait-il raison: en toute chose, il faut trouver et greffer son style... peut-être était-ce le style d'Yver de ne pas aimer le Jeu pour mieux y survivre?

-Tant que j'y suis: surveille la Baronne qui m'a fait subir une véritable torture. Je sens venir le souffle pestilentiel des on-dits.


Le Manoir Kaflan

Situé à 3 jours de carrosse de la capitale du duché, au nord, se dresse le domaine des Kaflan. Le Manoir Kaflan, juché au sommet d'une hauteur, dominait les terres environnantes était le symbole même de cette famille qui devait sa notoriété à l'exploitation minière de faible ampleur, de nickel, et, surtout, à l'architecture. Châteaux, palais, manoirs, maisons de maîtres, forteresses, rien ne les limitait.
Si beaucoup de structures étaient déjà existantes, les Kaflan s'y entendaient pour rénover ou améliorer celles-ci.
Le manoir étonnait par son côté imposant, quelque peu massif, tranchant avec les constructions élancées typiques d'Orlaïs. Mais, ce qui étonnait dans l'aspect de cet édifice, c'était ses fleurs: les murs extérieurs étaient littéralement recouverts de plantes grimpantes dont des rosiers à floraisons décalées, des jasmins et des chèvrefeuilles.
Du début du printemps à la fin de l'automne, les différentes plantes, par leurs floraisons, provoquaient des alternances de parfums agréables qui embaumaient jusqu'à plus d'un kilomètre selon le vent.
Jadis forteresse, il s'est modifié au fil des générations, chaque Comte y apportant sa touche personnelle, sa marque. Yver n'avait pas encore apporté la sienne, mais cela viendrait, assurément.
L'intérieur de la bâtisse, harmonieusement décoré, sans excès inutile, était un véritable hommage à la plus grande spécialité de la famille: les passages secrets. Le manoir était aussi déconcertant que son propriétaire: des projections étranges, des miroirs troublant les perceptions, des escaliers menant à des murs, des paliers non desservis et, par dessous tout, des passages secrets et murs coulissants ou pivotants en grande quantité permettant d'accéder à des pièces ou des couloirs. Qui n'était pas un habitué des lieux passait son temps à se perdre dans ce labyrinthe si un serviteur ne l'accompagnait pas. Yver était aimé de ses serviteurs et cette demeure, il la connaissait dans ses moindres recoins.
Sa complexité lui plaisait tant qu'il trouvait même le palais impérial ennuyeux à mourir. Le manoir était un régal pour le noble, s'y déplacer était un amusement permanent à ses yeux, un enfer pour d'autres.
Il se souvenait des heures, des jours à fureter avec Gérald et Natalya quand ils étaient enfants, des parties de cache-cache endiablées et autres drôleries. Il se souvint aussi de la fois où il resta bloqué une journée dans un passage car il ne trouvait pas le mécanisme d'ouverture intérieur. Heureusement, son frère ainé le retrouva à temps, juste avant que leurs parents ne commencent à s'inquiéter.

Yver dominait les terres de Kaflan et ses sujets d'une main solide, mais souple, telle la branche métallique d'une arbalète. La Baronnie de Kaflan était certainement l'une des moins contraignantes, si ce n'est la moins contraignante, de Combrelande au niveau de l'application des lois du Duché ou locales, mais la sanction était systématiquement terrible pour qui les enfreignaient. Ainsi pouvait se résumer la vision de la gouvernance d'Yver: "Je ne vous demande pas la lune, ni la mer à boire. Alors, respectez ce que je demande.".
Certes, Il tenait compte des circonstances de l'infraction, mais, si certaines pouvaient atténuer la sanction, extrêmement rares étaient celles qui pouvaient l'annuler.
Néanmoins, Yver était respecté et apprécié de ses sujets: il n'abusait jamais de son pouvoir et même s'il avait ce côté sévère typique de cette région, c'était pour le bien des gens vivant ici. Cela était nécessaire, il avait été éduqué ainsi: le peuple sent la faiblesse, il faut lui montrer que la mansuétude occasionnelle n'est en rien un signe de faiblesse. Mais, au fond, il n'était pas si féroce que ce qu'il semblait être et prenait de bonnes décisions (la première étant d'avoir choisi de bons intendants.).


Maintenant? On court!

Le laboratoire. Sa pièce préférée, celle où se concrétisait les idées. Il avait positionné le laboratoire au dernier étage pour des raisons de sécurité : en cas d'explosion intempestive, le manoir était moins secoué, même plus du tout, grâce à des systèmes de renforts des murs et d'ouverture. De plus, Yver avait mis au point un système d'arrosage pour circonscrire rapidement les débuts d'incendie.
Les murs du laboratoire était couvert de notes, de dessins, de plans. Les tables regorgeaient de plans de chauffe, de cornus, d'alambics, de pièces mécaniques variées.
-Touche pas ! Ordonna-t-il à l'adresse du petit curieux qui manipulait un cylindre de métal dont une extrémité était en cornet et serti d'une sorte de loupe en verre.
-Qu'est-ce ? Une espèce de longue-vue ? Demanda Heren en se rapprochant de la petite fenêtre du labo.
-Si tu tiens à ton œil, ne regarde pas ! C'est un allumeur de feu de camp solaire. Il concentre les rayons du soleil, grâce aux loupes et aux cristaux à l'intérieur. Même un soleil couchant fournit assez de lumière. Tu braques la grande partie vers le soleil, la petite vers le bois, et tu ne laisses pas ta main devant. Par contre, ça ne marche pas la nuit.

Yver assemblait diverses pièces et engrenages. Complètement concentré, il semblait tout de même avoir des yeux dans le dos.
-Surveille l'alambic, s'il te plait. Lorsque le thermomètre atteindra 85°, monte le de 4 crans. Il faut que ça frémisse, pas que ça bout.

Heren se souvint de l'étrange circonstance qui marqua le début d'une grande amitié entre eux. Il avait été engagé par Natalya, il y a 10 ans, pour protéger le jeune Baron. Heren était encore un adolescent, mais il faisait déjà parler de lui. Confronté à une bande d'assassins, il fut sérieusement blessé pour protéger Yver. Celui-ci le ramena au Manoir et découvrit que son sauveur n'était qu'un garçon encore juvénile, et pourtant un combattant confirmé.
Heren monta l'alambic, comme lui avait demandé son pote. Il ne comprenait pas tout ceci, toutes ces machines, ces engins étranges... et les pires étaient sur des dessins : Yver avait un coup de crayon incroyable. Ses plans étaient précis, les détails des pièces spécifiques bien respectés. Par contre, certains objets étaient tout simplement irréalisables.
-Penses-tu vraiment, qu'un jour, l'homme pourra voler ? Son œil était attiré par des dessins d'oiseaux.

Yver n'a jamais douté de cette amitié. Ils se comprenaient, s'appréciaient et savaient compter l'un sur l'autre. Heren sentit rapidement qu'Yver n'aimait pas se consacrer au Jeu, lui préférant infiniment les sciences et les sorties sous l'apparence d'un mercenaire. Yver avait 2 facettes en lui, vis à vis de ses connaissances : ce qui sortait de ce laboratoire était issu d'études précises, de calculs à flanquer des migraines insurmontables tandis que, dehors, il improvisait, bricolait, faisait avec les moyens du bord et selon les circonstances, et ça fonctionnait... pas toujours comme il l'aurait souhaité, mais cela faisait partie du charme de "l'aléa maitrisé".
Dehors, il était libre, comme dans ce laboratoire. Ici, son cerveau était libre, Dehors, c'était son âme qui se libérait. Par contre, le devoir le ramenait toujours à ses obligations, mais il les assumait avec plus de légèreté.
-Non ! Assurément, jamais... sauf par magie. Par contre, je gage qu'un jour il saura construire des machines qui lui permettront de voler. Le résultat sera le même mais, si j'arrive à créer ce jour, je n'hésiterai pas une seconde à en profiter.


Yver ignorait une bonne partie du passé de Heren. Autant Heren parlait de sa relation avec la Garde des Ombres sans souci, de sa vie de tueur à gages aussi, autant il ne révéla jamais qu'il avait été un esclave des Corbeaux d'Antiva... pour la propre sécurité de son ami, ou par honte de ce versant de son passé.
Il l'avait vu dériver, sombrer petit à petit dans une folie instable de meurtres. Il l'avait vu partir avec un Garde des Ombres et revenir avec une petite Elfe d'une douzaine d'année, Leena, sa disciple, qui, paradoxalement, lui avait rendu son âme.
Yver enseigna à Leena les techniques de close combat à mains nues, ainsi que certaines tactiques liées au Jeu.
Il savait l'essentiel : Heren le comprenait, était le seul à ne lui faire aucun reproche sur son rapport au Jeu, voir le trouvait marrant.
Bon sang, le nombre de sottises que ces 2 là avaient fait ensemble!
-Est-ce normal que ça... blublute ?
-On dit "frémir", Heren. "Blubluter" n'est pas un verbe existant dans la langue commune... ni aucune à ma connaissance, mais je ne me targue pas de toutes les connaître. Fit Yver avec un sourire amusé
-J'ai une bonne oreille, imbécile de nobliau. Je sais entendre quand un liquide frémit ou bout. Là, ce n'est ni l'un, ni l'autre : ça... blublute !

Yver se leva, intrigué. Quelque chose d'anormal se passait dans ce truc en cuivre. Il approcha l'oreille, partit fouiller dans ses papiers et sembla réfléchir.
-C'est pas vrai ! Je me suis planté dans mes calculs ! Là, j'ai mis "+" au lieu de "-" !
-C'est grave ?
-85°, c'est beaucoup trop ! Heren... sors !... vite !

2 flèches jaillirent du labo peu de temps avant qu'une explosion puissante ne les soulève de terre, les projetant sur 7 bons mètres.
Ils finirent au sol, le souffle coupé et le sentiment de l'avoir échappé belle. Certes, Yver l'avait souvent échappée belle !
Il éclata de rire.
-Yver ! Tu es un fou dangereux, on te l'a déjà dit ?!
-De quoi te plains-tu ? J'ai inventé la boule de feu liquide !
-Ce n'est pas une bonne idée !
La porte de la grande salle de bains, située au même étage que le laboratoire et la chambre d'Yver, s'ouvrit. Leena en sortit, aussi nue et trempée qu'on puisse l'être, tenant une serviette contre elle pour cacher l'essentiel.
-Qu'est-ce qu'il se passe ? C'est quoi ce bruit ? Demanda-t-elle, assez choquée par le boucan.
Yver devint écarlate et se plaça une main devant les yeux.
-Leena ! Gémit-il. Retourne dans cette salle de bains ! J'ai eu mon compte d'émotions fortes pour aujourd'hui !
Elle tourna son regard vers le maître d'armes.
-Maître ?
-Expérience d'Yver. Se contenta de dire Heren, sur un ton blasé.
-Yver, vous êtes un malade ! Un crétin suicidaire ! Fit l'Elfe en claquant la porte. Irrécupérable ! Un jour, vous allez vous tuer et vous l'aurez bien cherché !
-Faut plus qu'elle fasse ça ! Fit le scientifique.
-Oh ! Le pauvre petit choupinou sensible ! Fit Heren en s'asseyant.
-Ce n'est pas une question de sensibilité. Ne me prends pas pour une pucelle ! Fit Yver en faisant de même. Je la connais depuis ses 12 ans, alors, elle ne fait plus ça ! N'empêche que j'ai trouvé le secret de la boule de feu liquide !
-Oublie de suite ce "secret" !
-Mais avec quelques ajustements...
-N'y pense pas !... Heren empêcha son ami de parler, le coupant à chaque tentative : C'est une mauvaise idée... Que dalle !... Oublie, j'ai dis... Laisse tomber... Je vais flagorner !
-Non ! C'est bon ! Je laisse tomber ! J'ai bouffé des courbettes et bassesses à tous les repas pendant 15 jours, saligaud, et tu veux m'en remettre une couche ?
-Je n'hésiterai pas !

(Allez, petite zik: https://www.youtube.com/watch?v=XFz0D-bH58k )
Ils se toisèrent et ricanèrent.
-Allez, on se fait une virée. J'ai besoin de bière bon marché et de chansons paillardes. Et, il faudra que je te parle d'un boulot pour toi. Es-tu déjà allé à Montfort ?
-Seulement de passage, quelquefois. C'est plutôt tranquille, là-bas. Il n'y a pas grand chose comme contrats intéressants. Qui dois-je inhumer ?
Yver éclata de rire :
-Ce n'est pas du tueur, dont j'ai besoin, mais du maître d'armes.
-Qui ?
-Le fils d'un noble de là-bas. Ser Thelvan. C'était un ami de mon père. Un homme bien et respectable.
-Âge ?
-Je ne sais pas précisément. Aux alentours de 12 ou 13 ans, je crois.
-Âge correct pour commencer. Dangers éventuels ?
-Mis à part son épouse, ainsi que ses filles, je ne vois pas. Si elles sont à l'image de la génitrice, tu vas clairement en baver : la mère Thelvan est méprisante et méprisable. Inutile, pour autant, de les tuer.
-Je ne tue que si je suis payé pour le faire, c'est la règle. Tu n'es pas très précis, en tout cas. Pourtant, c'est censé être un ami de ton père?
-Ser Thelvan, si. Je le connais plutôt bien. Il passait de temps en temps au manoir, mais toujours seul. Père avait un peu la même réputation que moi. Il est cordial et sympathique, mais les autres... Je n'ai croisé son épouse qu'une fois et je préfèrerai éviter de retenter l'expérience : elle a failli me rendre misogyne en moins de 10 minutes. Je n'ai jamais vu aucun de ses enfants. Je sais juste qu'il a 2 ou 3 filles, à moins que ce soit 4 mais je n'en suis pas sûr, et un fils.

Yver se releva, imité par Heren.
-Bon. Je le ferai prévenir de ton arrivée. Par contre, pour l'instant, j'ai envie de me dégourdir les jambes et l'esprit. Alors, on va s'en jeter une bien fraiche en ville.
Je n'ai pas l'intention de passer la nuit à me morfondre. L'important, c'est de se faire plaisir tant qu'on est assez vivant pour le faire, non?

Il était temps pour Yver, de définitivement se calmer l'esprit, d'oublier ce Frangère mort et de profiter de la vie le temps d'une soirée, avant une virée plus longue un peu plus tard, sous les traits d'un marchand itinérant dont le visage était à moitié masqué sur la partie supérieure, au prétexte de cacher des blessures terribles. Yver n'était pas encore à l'aise avec le fait de se déplacer en public le visage découvert entièrement. Une couverture partielle était au minimum nécessaire, encore, à ses yeux.
Dehors, il trouvait les idées, avait ces éclairs qui le frappaient pour lui donner de nouvelles idées, des solutions à des problèmes insolubles. Il adorait ces moments, ces moments où rien n'empêche l'esprit de voler au dessus des nuages et des contraintes de la noblesse.
Pour l'instant, seule la soirée et de la bière bon marché comptaient.

(NdA: Mention des Thelvan faite avec l'aimable autorisation de Dorianna.)

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