Uther de Verchiel était un homme charmant, personne ne pouvait dire le contraire, et il savait mettre ses invités à leur aise. C’était la première fois qu’un noble, choisit par Dame Marguerite Thelvan, se montrait digne de l’intérêt de l’ainée des enfants Thelvan. Bien entendu, Dorianna ne serait aucunement dévastée si le Baron refusait de la fiancer, encore une fois, mais elle savait qu’elle ne serait pas peinée d’être l’épouse d’un tel homme. Milah, la seconde fille du Seigneur Thelvan et son épouse, lançait des petits regards à Uther, lorsque celui-ci ne la regardait pas. Rien n’était encore perdu pour cette enfant qui rêvait d’épouser le pouvoir, comme le lui souhaitait sa mère, et si Dorianna était trop commune aux yeux du Baron, elle n’hésiterait pas à prendre la place de son ainée. Il était étonnant que cette dernière ne soit pas déjà mariée; elle était prête à accepter n’importe quel homme que sa mère lui recommanderait, mais elle était une Thelvan, une noble de bas étage.

« Seigneur Thelvan, désirez-vous peut-être un verre afin de clore ce repas ? »

À ces mots, le père de famille porta son attention sur la Dame de la maison et inclina la tête légèrement : « C’est très gentil à vous, noble Dame, et j’aimerais bien un verre, mais seulement si le Baron m’accompagne. ». Il lança un petit sourire à Uther. Le Seigneur Renaud Thelvan était un homme simple et un bon vivant. Il appréciait boire, mais jamais seul. Pour lui, l’alcool était un plaisir à partager. Sa femme, Dame Marguerite Thelvan, lui lança un regard réprobateur (c’était à quoi que c’était la seule expression que ses yeux étaient capables de projeter), mais ne dit rien. Après tout, c’était la future belle-maman de l’une de ses filles qui avait proposé à son époux de prendre un verre.

« Tu aimes les chevaux Albert ? »

Le plus jeune des enfants Thelvan, après avoir bien rigolé, s’était amusé à regarder la réaction de sa mère à chaque mot qui étaient prononcé pendant le repas. Lorsqu’il entendit son nom être prononcé, il fut tout d’abord surpris, puis, lorsqu’il réalisa que c’était la jeune sœur du Baron qui s’était adressé à lui, il rougit. La jeune fille devait avoir, tout au plus, deux ans de moins que lui seulement, et elle était très jolie. Albert sourit à la jeune Elisabeth et lui répondit : « J’adore ces bêtes! Nous en avons plusieurs à la maison! Orage est mon cheval préféré; il est tout grisonnant, parce qu’il est très vieux, mais tous les matins, je le fais galoper et je suis le seul à le monter! Mes sœurs ont trop peur qu’il s’écroule de faiblesse. ». Le jeune homme lança un regard amusé à ses sœurs puis rapporta son attention sur la jeune fille : « Et vous Elisabeth? Aimez-vous les chevaux? »

Uther n'avait rien dit depuis quelques secondes, il se contentait d'observer parfois intrigué parfois las n'ayant que pour envie de quitter la table et profiter du temps clément de la journée. Mais il était baron et ses invités auraient eu d'un mauvais œil cette réaction, bien qu'il aurait pu aisément le faire sans devoir se justifier d'aucune manière. Cependant, les filles Thelvan l'intriguait, elles semblaient toutes différentes et cela l'amusait que malgré leurs liens de sang, elles ne se ressemblent que physiquement. Le baron observait donc chacune dans leur comportement, essayant de déchiffrer le caractère et la personnalité de chacune. Sa mère venait de proposer au seigneur Thelvan un digestif pour terminer le repas, par coutume cela était proposé uniquement aux hommes bien qu'Uther considérait cela comme totalement idiot de ne pas en proposer aux femmes également. Qu'importe, c'était la tradition comme les masques qu'ils avaient évoqués lors du début du repas. Le chevalier regarda le seigneur Thelvan, il pouvait sentir son désir de partager en verre en sa compagnie, mais cela ne disait rien au noble pour l'instant.

"Nous pouvons attendre le dîner, cela nous permettra de discuter au coin du feu, qu'en dites-vous Seigneur Thelvan ?". Uther ne désirait pas prendre de verre en plus de ce qui avait été servit lors du repas, cela lui permettrait de régler ses affaires rapidement, signer les documents officiels qui étaient en attente et puis il devait s'entretenir surement avec toute la famille qui lui poserait surement mille et une question. De plus la raison de cette invitation était avant tout politique. Bien que l'homme n'avait pas l'intention de réaliser un mariage entre les deux familles, il regardait sa demi-soeur avec attention, elle été allait d'elle-même parler au jeune Thelvan, peut-être qu'une promesse d'alliance allait être possible après tout. Cela lui éviterait certainement le mariage alors que son coeur balançait pour une autre femme.

Le noble sourit voyant la discussion entre Elisabeth et le jeune Albert concernant les chevaux, il se souvint lui-même avoir quitté sans autorisation plus d'une fois la table pour aller dans les écuries. Sans doute était-ce le signe qu'il devait devenir chevalier, mais dans le cas de sa demi-soeur, que cela pouvait-il dire ? "Ho oui ! J'adore les chevaux, j'ai même eu mon poulain récemment, tu veux que je te le montre ?" annonça alors la jeune noble à Albert en guise de réponse à sa question.

L’attention de Dorianna était dirigée sur la conversation qu’entretenaient son jeune frère et la sœur du Baron de Verchiel. Devant elle, ce dernier proposait au Seigneur Renault de boire plus tard, ce à quoi son père répondit par le positif, mais la jeune noble n’entendit pas ses paroles; elle souriait en voyant son jeune frère rougir face à la jeune Elizabeth. Tournant les yeux en direction de la jeune fille qui prenait à nouveau la parole, le regard de Dorianna croisa celui du Baron; tous deux suivaient avec attention la conversation de leurs benjamins. L’ainée Thelvan adressa un sourire espiègle à Uther puis regarda sa sœur.

À la proposition de la jeune Dame, Albert jeta un regard à son père, comme s’il attendait son approbation, puis, se tourna vers la jeune fille en souriant de plus belle : « Je serais honoré de voir une telle bête! ». D’un mouvement rapide, le jeune seigneur recula sa chaise et se leva sur ses pieds, mais au même moment, Dame Marguerite Thelvan l’interpela : « Albert! Où sont vos manières? Le Baron vous a-t-il donné la permission de quitter cette table?...Pardonnez mon fils, votre seigneurie, il est jeune et ne sait pas toujours comment contenir son impulsivité…heureusement que mes filles ne sont pas ainsi… » dit la femme ronde en adressant un sourire à ses quatre filles. Bien dressées, les jeunes femmes Thelvan se redressèrent sur leur chaise, toutes, à l’exception de Dorianna qui regardait à présent sa mère, d’un regard sérieux dans lequel il était possible de lire une pointe d’exaspération. « Je peux paraitre sévère parfois, mais je tiens à ce que mes enfants aient une éducation irrépro’… » commença-t-elle avant d’être interrompue par la voix de son époux, le Seigneur Thelvan. « Ma chère, laissez les enfants s’amuser! Pardonnez-moi, nobles dames et votre seigneurie, mais ma dame, je vous en prie, cessez d’être si protocolaire; nous avons fait un long voyage et les enfants sont épuisés. Que diriez-vous, votre seigneurie, de mettre un terme à ce merveilleux repas et de laisser votre jeune sœur montrer son poulain à mon fils? » dit le Seigneur Renault en s’adressant, dans un premier temps, à sa femme, puis à leurs hôtes, pour enfin regarder Uther.

Dame Marguerite avala ses mots et ne répondit rien à son époux alors que Milah fronçait les sourcils en direction de son père. Isabella et Clara se regardaient en tentant de dissimuler un fou rire, Albert, qui s’était rassis lors de l’intervention de sa mère, n’osait plus lever les yeux, et finalement, Dorianna regardait Uther, ne sachant quelle serait sa réaction.

Le baron souriait en observant la conversation des deux jeunes nobles. Il fallait bien l'admettre l'enfance dont ils jouissaient lui apporter un réconfort au palpitant. Malgré le noble jeu et les intrigues de la coure, il y avait une telle naïveté de la part de leur échange que cela fit sourire le chevalier. Avait-il aussi naïf et inconscient de ce qui l'attendait plus tard un jour ? Peut-être, surement. Ils avaient tous été enfant et même si certain s'en était désormais totalement détaché, Uther appréciait leurs compagnies, pour leurs remarques, leurs paroles parfois trop franche et le manque de protocole. Cela était drôle de voir les autres nobles gênés à cause de ce manque dû à leur âge. Le chevalier sorti de ses pensées lorsque Dame Thelvan s'adressa à son fils. Visiblement cette petite femme ronde faisait partie des personnes trop éloignées de l'enfance pour se rappeler de sa beauté.

Quel jolie stratagème admit-il. Partir sur une correction de l'attitude de son fils pour parler de ses filles au baron. Un joli coup, il fallait l'avouer. Le regard du baron se posa sur chaque fille une à une, seule Dorianna semblait en avoir assez des manoeuvres politiques, ce qui rassurait le baron dans son idée que Dame Thelvan en faisait trop. Uther s'attendait à devoir supporter un discours sur les effets que son comportement strict était uniquement pour le bien de ses enfants avec des exemples et des démonstrations. Heureusement pour lui, ce fut son époux qui le sauva, surement lui aussi fatigué d'entendre la vente des qualités des enfants Thelvan, même si le chevalier ne doutait pas que le seigneur se vantait également de la beauté de ceux-ci - et il pouvait se le permettre - cependant, il aimait l'attitude humble de celui-ci. Il profitait de sa présence en Verchiel sans chercher à vendre l'un de ses enfants comme un simple objet pour grimper dans l'échelle sociale. Sa stratégie était tout autre et se lier de sympathie pour le baron avant d'aborder le thème du mariage était tout à fait la plus efficace, selon le chevalier du moins et la plus dangereuse, car en cas de refus cela pourrait être perçus comme un manque à l'amitié.

Uther écouta attentivement le seigneur Thelvan parler et hocha la tête doucement lorsqu'il eut fini. "J'en convient seigneur Thelvan. Il semblerait que nos jeunes souhaitent faire une autre activité que manger." ajouta-t-il sur le ton de l'humour. "Mettons fin au repas, vous pourrez ainsi visiter la demeure et nous pourrions nous retrouver si l'envie vous en dis plus tard dans les jardins, ou une tout autre pièce." La bibliothèque ou bien la salle commune pouvait être un parfait endroit pour discuter. Pour les amateurs de lecture et de religion, il y avait toujours des livres parlant à la fois du cantique et de l’immatérielle bien qu'abstrait ce ne sont que des livres dédié à la réflexion de ce que peut être vraiment ce royaume dont seuls les mages connaissent un peu.

Dans le silence le plus improbable les deux enfants sortirent de la pièce vers la porte et sans aucun doute l'écurie. La petite Elizabeth allait sans doute fatiguer le pauvre Albert à parler sans arrêt, mais si les deux jeunes se liait d'un lien important, alors il serait envisagé un possible alliance avec la famille Thelvan, cependant, il n'était encore le temps d'y penser. Ils étaient trop jeunes pour le moment.

« Mettons fin au repas, vous pourrez ainsi visiter la demeure et nous pourrions nous retrouver si l'envie vous en dit plus tard dans les jardins, ou une tout autre pièce. ».

Le Seigneur Thelvan fut le premier (à l’exception d’Elizabeth et Albert) à se lever en adressant un sourire heureux au jeune Baron et à sa noble mère. « Mon noble postérieur vous remercie, votre Seigneurie! » s’exclama alors le père de Dorianna en éclatant d’un rire franc. La route séparant Montfort et Verchiel avait été longue et avait engourdi les membres inférieurs du Seigneur Renault qui n’avait envie que de bouger un peu après un si copieux repas. Dame Thelvan se leva à son tour; la femme ronde boudait le déroulement du repas qui ne prenait pas la tournure qu’elle avait souhaité, mais rien n’était encore perdu. Elle lança un regard à chacune de ses filles que les jeunes dames comprenaient très bien. Si l’une d’elles voulait repartir de Verchiel avec un fiancé, elle devait passer du temps avec le Baron. Dorianna, qui avait gardé son regard dans la direction du Baron, lui adressa un sourire, s’apprêtant à lui proposer de passer quelque temps avec lui. Uther était un homme agréable et, indépendamment des souhaits de Dame Thelvan, l’ainée des enfants Thelvan avait envie de passer du temps avec cet homme charmant. Dorianna n’avait, toute fois, pas envie de jouer à un jeu; si elle devait séduire Uther, ce serait grâce à sa personnalité et tout se ferait naturellement. Peut-être se découvrirait-elle une attirance pour le Baron également? Tout était possible. Alors que la jeune noble ouvrait la bouche pour parler au Baron, ce fut la voix de Milah qui s’éleva : « Votre Seigneurie, accepteriez-vous de m’accompagner pour une visite de votre somptueuse demeure? ». Dorianna, Isabella et Clara tournèrent les yeux vers leur sœur. Dame Marguerite Thelvan se gonfla de joie et d’orgueil en voyant sa fille adorée prendre les devants sur son ainée qui ne savait pas saisir sa chance d’être mariée à un homme si puissant. Milah était, selon plusieurs, la plus belle des filles Thelvan, mais n’avait jamais été mariée, malgré les nombreuses demandes en mariage qu’elle avait reçues; Milah était dévorée des mêmes ambitions de pouvoir que sa noble mère. Uther représentait, pour elle, une chance incroyable et elle ne pouvait laisser un tel homme à Dorianna. Milah levait le menton, ignorant volontairement les regards de ses sœurs et battait des cils élégamment; cette petite connaissait bien le rôle qu’elle devait jouer.

N’attendant pas le dénouement de cette histoire, Isabella et Clara se levèrent à leur tour et décidèrent de rejoindre leur jeune frère et la sœur du Baron; elles se faisaient un malin plaisir de jouer aux chaperons et pour être bien honnête, elles n’avaient aucune envie de prendre part au jeu de séduction qui se jouait.

Uther lâcha un rire franc accompagnant celui du seigneur Thelvan. Il était honnête en annonçant que son "noble postérieur" avait besoin de marcher. Il aimait déjà cet homme qui utilisait les mots les plus simples avec une pointe d'humour. Le baron s'était levé pour accompagner le départ des deux nobles leurs accordant une inclinaison de la tête à leur départ, Dame Sophie était resté assise dans sa chaise et s'était remise droite, fière de siéger autour de cette table. Le regard d'Uther se posa maintenant sur les jeunes filles s'attendant à ce qu'elles désirent sortirent également avec leurs parents, ce qui aurait été des plus logiques dira-t-on. Quel ne fut pas sa surprise lorsqu'il entendit la singulière demande de Milah s'il avait bien retenu le nom. Il observa attentivement la jeune noble et remarqua que deux de ses sœurs sortirent. Il fallait croire que le mariage était dans la tête de deux des filles Thelvan, cela amusa Uther aussi il passa d'abord sa main sur sa barbe de trois jours avant de poser son regard sur Dorianna, l'aînée de la famille ne bougeait pas, elle l'observait. Il serait intéressant de passer plus de temps en sa compagnie, elle ne semblait pas avoir tiré du caractère de sa mère, mais visiblement plus de celui de son père. Il s'attarda avant de finalement offrir la réponse à la jeune noble. "Il serait pour moi un grand plaisir de vous montrer ma demeure." Le chevalier reprit son souffle et se tourna vers l'aînée des Thelvan "Que diriez-vous de faire la visite avec nous demoiselle Dorianna.". Le noble se satisfaisait à observer les regards de ceux qui avaient des plans et les voyait se dérouler non comme il l'avait prévus, mais en accord avec la volonté de leur cible.

C'était principalement pour cette raison qu'Uther n'avait pour l'instant pas eu recourt aux bardes. Si ce n'était pour un divertissement bien évidemment comme l'exigé la coutumes lorsqu'un invité de haut-rang venait en sa demeure. Le baron détaillé l'aînée des Thelvan, elle était certes magnifique et il ne doutait pas que seul un fou refuserait de la prendre pour épouse. Cependant, Uther était peut-être un fou. Il ne prenait jamais la main d'une femme, il lui demandait. Et cela n'était hélas pas encore arrivé au grand damne de sa propre mère qui aurait voulu il y a quelques années lorsqu'il revint de l'académie se voir belle-mère de la baronne. Le séjour des Thelvan en Verchiel allait se révéler surement très intéressant. Le chevalier fini son verre en attendant la réponse de la belle Dorianna.

Lorsque le Baron donna sa réponse à Milah, Dorianna se leva à son tour afin de rejoindre, avec un peu de chance, ses parents qui venaient de quitter la salle à manger. Le Seigneur Renault accepterait peut-être de faire une bataille de boules de neige avec son aînée, ou alors, tous deux iraient à la bibliothèque lire des histoires qui ne s’étaient jamais rendues à Montfort. De son côté, Milah jeta un regard fort séduisant au Baron en se levant lentement et gracieusement de sa chaise afin de permettre à Uther d’observer son élégance; la rapidité avec laquelle Dorianna s’était levé aidait également sa cadette à paraitre encore plus douce.

Comme le voulait l’étiquette, Dorianna s’inclina légèrement en direction du Baron et de sa noble mère avant de prendre la direction de la porte. « Que diriez-vous de faire la visite avec nous demoiselle Dorianna. ». La jeune noble cessa immédiatement de marcher lorsqu’elle entendit la proposition d’Uther. Faisant volte-face, Dorianna jeta un bref regard à sa cadette qui ne semblait pas apprécier de ne pas avoir réussi à suffire au Baron. « Cette proposition me plait, votre seigneurie, d’autant plus que si je ne veux pas me perdre entre les murs de votre demeure, une visite des lieux serait appropriée! » répondit l’aînée Thelvan avec un sourire amusé.

Milah, sans un regard à la noble mère du Baron, avança vers sa sœur et glissa son bras sous celui de Dorianna. « Quel plaisir de faire cette visite en votre compagnie, chère sœur! » dit la cadette, sur un ton faussement joyeux. Dorianna fronça les sourcils en posant son regard dans celui de Milah; étaient-elles maintenant rivales? Si le Créateur avait dans ses plans de créer une alliance entre les deux familles par l’union de Dorianna et d’Uther, qu’il en soit ainsi, mais si Milah plaisait au Baron, en aucun cas elle tenterait de nuire au possible bonheur de sa cadette.

Bientôt, Dorianna, Milah et Uther se retrouvèrent dans l’un des couloirs de la demeure de Verchiel. « Chère sœur, je ne puis vous cacher plus longtemps mon étonnement! Lorsque notre frère a quitté le repas en compagnie de la très jolie Elizabeth, je m’attendais à vous voir les suivre, vous qui aimez tant vous retrouver dans les écuries… ». Milah avait parlé sur un ton léger qui se voulait fraternel, mais Dorianna voyait clairement où sa cadette voulait en venir. « …J’admire votre jeunesse éternelle; vous êtes mon aînée, mais je vous surprends souvent à jouer telle une gamine avec notre frère ou encore avec ce jeune homme, quel est son nom déjà?...Bertrand? Le palefrenier de notre père? N’est-il pas plus jeune que vous? ». Milah tourna les yeux dans la direction d’Uther.

À la fin des mots de Milah, Dorianna éclata d’un rire mélodieux, mais légèrement forcé. « Barthélémy est le nom du palefrenier de notre père et il est effectivement plus jeune que nous. Néanmoins, vous pensez croire que je passe beaucoup de temps en sa compagnie alors que cela est faux; serait-ce une inquiétude de notre mère? ». Prenant une courte pause, Dorianna poursuivit : « Le jour viendra bien assez tôt où je serai marié à un homme choisi par notre mère; d’ici là, je veux m’amuser, rire et rêver autant que possible… » dit-elle plus pour elle-même, mais tout de même assez fort pour que tous puissent entendre. Loin de Dame Thelvan, Dorianna pouvait parler librement et tant pis si cela ne plaisait pas au Baron; Milah aurait ainsi peut-être plus chance de réaliser les souhaits de leur mère.

Le chevalier fini donc son verre et le déposa en écoutant attentivement la charmante noble offrir une réponse positive à sa proposition. Le regard qu'elle jeta à sa petite sœur ne lui échappa en rien et son air étonné non plus. Serait-ce le début d'une rivalité ? S'il avait proposé à Dorianna c'était dans le but de ne pas être seul avec la jeune Milah, bien qu'elle soit jeune il ne voulait rien laisser au hasard et porter un avis prédéfinis sur son âge. La stratégie dont elle userait pourrait être des plus redoutables comme la plus pittoresque. Il invita les deux nobles à sortir dans le couloir et salua sa noble mère avant de sortir de la pièce. La vieille dame prenait toujours son temps à table avant de pouvoir sortir, Uther n'en connaissait pas la raison.

« Chère sœur, je ne puis vous cacher plus longtemps mon étonnement! Lorsque notre frère a quitté le repas en compagnie de la très jolie Elizabeth, je m’attendais à vous voir les suivre, vous qui aimez tant vous retrouver dans les écuries…». Voilà donc la première attaque de la jeune Milah pour son aînée, si le duel avait été à l'épée Uther avait appris que porter le premier coup n'est pas forcément la meilleure idée. L'on y dévoilait souvent ses faiblesses par sa colère ou autres émotions. Le baron hésita un instant à couper net la cadette dans son élan, mais celle-ci enchaîna rapidement portant son regard sur celui du noble. Un moment qu'Uther jugea de gênant, elle cherchait sans doute à obtenir son avis et à discréditer sa sœur, pour cela elle faisait tout bien, malheureusement Uther était un chevalier et de ce fait il avait un code d'honneur très strict. Aussi cette méthode aurait fonctionné à la coure ou tout autres endroits, mais en Verchiel et en sa présence ces mots n'avaient aucun poids.

La réponse de Dorianna ne se fit pas attendre et le baron l'écouta attentivement. Elle corrigea le prénom du palefrenier ce qui au moins était une marque d'un respect éprouvé pour cet homme qu'il ne connaissait pas. Cette jeune femme rêvait d'une autre vie que celle d'une noble destinée à être mariée cela crevait le plafond. Et pourtant elle s'y résignerait dans quelques années, du moins ce qu'on devait comprendre dans ses paroles. Uther n'avait rien à faire remarquer sur les paroles échangées entre les deux femmes, elles étaient toutes les deux avec un caractère fort et différent. L'une était parfaite pour la coure, l'autre aimait la liberté.

"Mesdemoiselles, il est pour moi un grand plaisir de vous faire visiter ma demeure comme j'espère vous faire visiter Verchiel pendant votre séjour. Cependant, que diriez-vous de laisser les affaires en cours pour simplement apprécier l'instant présent et partager ensemble ?" Cela n'apaiserait pas les tensions, mais mettrais de côtés pendant un temps les remarques désobligeantes du moins il l'espérait. D'une manière ou d'une autre cela était inévitable. "Que diriez-vous de commencer par les jardins pour profiter du temps clair de la journée avant que la nuit ne nous en empêche ?"

« Mesdemoiselles, il est pour moi un grand plaisir de vous faire visiter ma demeure comme j'espère vous faire visiter Verchiel pendant votre séjour. Cependant, que diriez-vous de laisser les affaires en cours pour simplement apprécier l'instant présent et partager ensemble ? » À ces mots, Milah lança un regard à sa sœur ainée, comme si cette remarque n’était destinée qu’à elle seule, alors que Dorianna acquiesçait, en accord avec le Baron. « Que diriez-vous de commencer par les jardins pour profiter du temps clair de la journée avant que la nuit ne nous en empêche ? » Soudain, la jeune sœur de Dorianna laissa le bras de sa sœur et se rapprocha de Uther, glissant son bras sous le sien. « Ne pensez-vous pas qu’il fait trop froid, votre Seigneurie? » demanda-t-elle d’une voix faussement inquiète en battant des cils, le regard levé vers le visage du Baron.

De son côté, l’ainée des enfants Thelvan leva les yeux au ciel; Milah était beaucoup trop insistante, du moins, selon l’avis de Dorianna. Après tout, peut-être que cette attitude allait plaire au Baron…tout était possible. De plus en plus à l’aise, en grande partie grâce à l’absence de Dame Thelvan et parce que se battre le cœur de Uther de Verchiel n’était pas dans ses plans, la jeune femme s’exclama : « Êtes-vous certains de vouloir aller dans les jardins? La légende raconte qu’ils sont parfois peuplés de gnomes qui prennent vie pour capturer les jeunes gens insouciants et les transformer en gnomes! ». Dorianna avait pris une voix mystérieuse; elle venait de décider qu’ils allaient vivre une aventure, que Milah et Uther le veulent ou non. La jeune femme marcha rapidement pour dépasser le Baron et Milah, qui se tenait toujours à son bras, et fit rapidement volte-face vers eux. « Vous êtes chanceux que je sois présente, moi seule connais le moyen de nous débarrasser de ces créatures… » poursuivit-elle en adressant un clin d’œil aux deux jeunes gens.

Milah jeta un regard scandalisé à sa sœur ainée, mais était heureuse, au fond d’elle, que le naturel gamin et joueur de Dorianna ait remonté à la surface; le Baron n’accepterait jamais d’épouser une telle femme, ce qui lui laissait toutes ses chances pour le séduire. Malheureusement pour la jeune noble, la première fille du Seigneur Thelvan n’avait pas terminé ses enfantillages. Tournant la tête rapidement, elle demanda : « Qu’était-ce?...Avez-vous entendu?...Oh! Les gnomes ont senti de la chair fraiche, notre venue à Verchiel n’est pas passée inaperçue! J’entends leurs petits pas, et vous, mon seigneur? ». Dorianna posa son regard dans celui du Baron; c’était à lui de jouer, ou pas…

Uther se tenait droit et remarqua le petit regard que la cadette glissa à sa soeur. Au moins avait-elle compris que cette remarque lui était en partie destinée. Il avait proposé de faire visiter l'extérieur de la demeure tant que le soleil éclairer les jardins, il faisait froid c'était un fait, mais acceptable si l'on était bien couvert et puis, les jardins ne seraient pas forcément long à visiter. Cependant, il dut tout de même répondre à la jeune noble qui s'inquiétait pour la température. "Il n'existe rien de plus vivifiant la fraicheur de cette saison Demoiselle. Et je ne vous laisserais point sortir sans vous avoir offert de quoi vous couvrir.". Il regarda la jeune femme qui s'était accroché à son bras délaissant ainsi celui de sa soeur, s'il avait réussi à éloigner la cadette de son aînée pour les remarques désobligeantes il se devait de maintenir l'attention de la petite noble sur lui. Autant pour le jeu que par amusement. Cela lui plaisait, les rares fois où il jouait, il aimait étudier la stratégie que ce soit sur un champ de bataille ou dans les discussions de nobles.

Voilà quelque chose qu'il n'avait pas prévus. Dorianna commença à raconter des légendes inventés sur les jardins de Verchiel. Au début Uther ne comprit pas exactement "Des gnomes en Verchiel ?" Il eut à peine le temps de finir sa question que la jeune noble continua surenchérissant la légende et le danger que représentaient ces gnomes. Le Baron sourit lorsqu'il comprit le petit jeu de la jeune femme, voilà qui était inattendu, mais cela ne déplaisait pas pour autant au chevalier qui trouvait cela amusant comme l'envie et la passion dans les mots de l'aînée Thelvan. Après avoir expliqué le contexte, elle envoya l'intrigue, prétextant avoir entendu des bruits de pas, des petits pas, ceux des gnomes des jardins. La question s'ils avaient entendu également s'adressa alors à Uther qui eu un moment de doute sur quoi répondre. Il voulait savoir jusqu'où la jeune noble pouvait aller, mais comment s'y prendre ? Voilà bien longtemps qu'il n'avait pas imaginé tel scénario.

"Est-ce possible qu'ils soient rentrés ?" demanda-t-il alors. Il venait de rentrer dans le jeu de la noble et la partie était engagée, il ne restait plus qu'à la jeune Milah de rentrer, mais si le baron avait bien capté ses intentions elle rentrerait pour ne pas le décevoir. Ainsi éloignée du noble jeu, il verrait si elle était aussi habile que ça dans la stratégie et les mots doux. Bien qu'il n'ait aucune intention particulière il aimait voir toutes les compétences d'une personne pour l'apprécier à sa juste valeur. Comme on lui avait appris à l'académie. Il feint un moment de tête vers l'arrière et revint doucement sur Dorianna le regard lourd, comme s'il faisait comprendre à l'aînée Thelvan que les ennemis étaient surement entrés par derrières.

Milah vivait un rêve; elle était accrochée au bras du plus séduisant Baron de tout Thédas, battant des cils pendant que ce dernier la rassurait en lui disant qu’il ne la laisserait pas avoir froid. N’était-ce pas le signe d’une demande en mariage imminente? Malheureusement pour la jeune sœur de Dorianna, cette dernière avait décidé de nuire à son bonheur en inventant un jeu de gamins. Uther semblait ne pas comprendre la folie qui habitait l’ainée des enfants Thelvan et lorsqu’il s’interrogea au sujet de gnomes à Verchiel, cette dernière l’ignora, poursuivant son délire jusqu’à inclure le Baron, lui demandant s’il avait lui aussi entendu les petits pas des gnomes. Milah fit une pression sur le bras d’Uther, levant les yeux vers son doux visage, prête à le sauver de Dorianna et ses histoires lorsque ce dernier répondit enfin : « Est-ce possible qu'ils soient rentrés ? ».

Dorianna se retint pour ne pas laisser paraitre sa joie; le Baron était joueur, décidément, il possédait beaucoup de qualités suscitant l’admiration de l’ainée Thelvan. Entrée dans l’univers qu’elle venait de créer, elle écarquilla les yeux à l’idée que les gnomes soient à l’intérieur des murs de la résidence de Verchiel. Doucement, elle leva un doigt à ses lèvres pour indiquer à ses compagnons d’aventures qu’ils devaient être silencieux. Milah avait deux choix; elle refusait de jouer, contrairement à sa sœur et au Baron dont elle convoitait le titre, ou elle jouait, profitant de ce moment pour séduire cet homme. « Votre Seigneurie, allez-vous me protéger? » demanda-t-elle en regardant Dorianna dans les yeux, presque en signe de défi, et en chuchotant. Pendant ce temps, l’ainée des enfants Thelvan s’était levée sur la pointe des pieds, de la plus délicate des manières, afin de dégager ses talons de ses chaussures beaucoup trop bruyantes. Doucement, Dorianna déposa un pied nu sur le carrelage, suivi de l’autre; s’ils devaient fuir les gnomes, ceux-ci ne devaient pas entendre ses pas! La jeune femme entreprit ensuite de soulever légèrement sa robe afin de ne point laisser cette dernière trainer sur le sol, pour la même raison évoquée précédemment.

Lorsque ce fut chose faite, Dorianna leva les mains à la hauteur de son visage et se mit à faire des signes qui ne voulaient rien dire, mais qui, dans le contexte imaginaire, voulaient indiquer à ses compagnons les manœuvres à suivre pour éviter les gnomes. Bien entendu, ces derniers imagineraient bien ce qu’ils voulaient de ces signes, là était tout le plaisir du jeu. Fléchissant les genoux, la jeune femme saisit ses souliers afin de ne pas laisser une piste à suivre aux gnomes. « Votre Seigneurie, longez le mur! » articula la jeune femme dans un murmure avant de s’exécuter elle-même, après s’être redressée.

Milah, de son côté, n’osait faire comme son ainée, elle était bien prête à jouer pour le cœur du Baron, mais pas à perdre sa dignité.

Le baron senti la pression sur son bras et le regard de la jeune Thelvan se porter sur lui avec insistance. Elle pensait peut-être qu'il devait être sauvé de l'imagination de son aînée. Mais Uther aimait bien voir jusqu'où les choses pouvaient aller. Il observa Dorianna et hocha la tête quand celle-ci appuya son doigt contre sa bouche pour signaler de ne faire aucun bruit. Comme il s'y était attendu, la jeune Milah rentra également dans le jeu de sa soeur demandant assistance du Baron afin de lui assurer la protection. Il répondit à voix basse regardant la jeune noble. "N'ayez crainte demoiselle, vous pourrez compter sur ma protection."Au moins, il pouvait la pousser à continuer dans la voie qu'elle avait empruntée et ainsi continuer le jeu de Dorianna. Il observa attentivement du coin de l'oeil l'aînée des Thelvan, faisant semblant de surveiller les alentours, il la vit retirer ses talons et les prendre silencieusement, appliquée. Si l'on se fiait à son comportement on pourrait se perdre avec elle dans son imagination et ainsi rentrer totalement dans l'histoire de la jeune noble, ce qui n'était actuellement pas pour déplaire au baron de Verchiel. L'ordre du meneur du jeu qu'était Dorianna était de longer les murs. Il senti pendant un instant la réticence de la jeune Milah a imiter sa soeur et ainsi obéir aux ordres qu'elle avait donnée. Uther l'attira alors contre le mur et s'y colla juste après.

Voilà une situation bien différente de ce qu'il aurait pu imaginer vivre durant le séjour de la famille de Montfort à Verchiel. C'était la découverte et la fascination qui envahissait l'esprit du chevalier. Il porta un regard sur la jeune Dorianna, puis sur Milah. Il voulait la convaincre de s'adonner entièrement au jeu de sa sœur. Malheureusement Uther était également un stratège et si elle jouait et apprenait de sa sœur via cette intrigue imaginaire, elle saurait sans doute mieux jouer la comédie par la suite auprès des autres nobles. Bien qu'elle la joue parfaitement, elle n'était pas assez naturelle, elle sonnait fausse et simplement attirer par plus prestigieux que sa condition actuelle. Cependant, ce n'était pas très grave il pouvait bien pousser la jeune noble dans ses retranchements de ses compétences de comédie.

Il stoppa les deux femmes d'un coup, arrivant prêt d'un encadrement d'une porte. Il voulait jouer la méfiance, les gnomes pouvaient être partout. "Prenons garde." dit-il à l'intention des deux femmes. Le chevalier proposa avec des signes de passer devant afin de vérifier que tout aille bien. Il se voulait comme il était dans une bataille réelle, bien-veillant et protecteur envers ses alliés.

Le Baron de Verchiel, longeant le mur en compagnie de deux jeunes femmes; le portrait aurait rendu perplexe bien des gens, mais heureusement pour le petit jeu de Dorianna, personne n’avait choisis s’emprunter ce corridor. La jeune noble ne pouvait imaginer ce qui se passerait si sa mère venait à passer; elle approuverait peut-être le temps que ses filles passent en compagnie de l’objet de leur visite à Verchiel, mais réprimanderait les manières de Dorianna. Le but était de séduire le Baron, pas de l’amuser!

Uther avait conduit les deux jeunes femmes jusqu’à un obstacle de taille; l’encadrement d’une porte. Les gnomes se trouvaient peut-être de l’autre côté! « Prenons garde. » dit le Baron, à l’intention de deux filles Thelvan avant de faire une série de signes voulant dire qu’il se proposait pour passer devant, au cas où les gnomes soient plus près que les aventuriers l’avaient imaginé.

Alors que Milah acquiesçait, désirant jouer le jeu pour le Baron, Dorianna attrapa le bras de ce dernier pour le retenir. Elle avait pris un air grave, comme si la vie de cet homme était réellement en danger. « Ne prenez aucun risque inutile! Verchiel a trop besoin de vous…Milah et moi avons besoin de vous… ». Dorianna tourna les yeux en direction de sa sœur puis rapporta son attention vers Uther. « Ne sous-estimez pas ces créatures, mon seigneur, elles sont diaboliques. Si l’une d’elles vous aperçoit, il vous faudra la regarder droit dans les yeux et chanter. Cela la figera pendant quelques secondes, vous laissant le temps de vous sauver, mais s’il y a plusieurs gnomes, cette technique ne fonctionnera pas. De plus, si d’autres gnomes se trouvent à proximité, ils vous entendront chanter et vous serez perdu… ». Dorianna avait mis tant d’émotions dans sa voix, se laissant imprégner par le jeu, que ses yeux s’étaient remplis de larmes, comme si elle craignait vraiment de voir le Baron se faire attaquer.

Milah secoua la tête, désapprouvant la trop grande implication de sa sœur dans ce jeu imaginaire, mais n’osa ne rien dire; le Baron mettrait fin lui-même à ces gamineries ou elle le suivrait jusqu’à la fin.

Uther allait passer devant les deux femmes Thelvan pour s'assurer que la traversée de l'encadrement de la porte ne soit pas un piège quand Dorianna lui agrippa le bras. Surpris il s'arrêta net écoutant avec attention les dire de l'auteur de ce jeu. Le sérieux et la voix de la jeune femme surprirent le baron dans un premier temps le faisant presque sourire tellement le jeu d'acteur de l'aînée était parfait. Cependant, il reprit vite ses esprits et se concentra sur sa tâche. Les paroles de Dorianna aurait faient mouche si seulement elle s'était adressée à un autre noble plus classique. Uther lui avait appris à défendre ceux qui ne pouvaient se battre, il était donc hors de question de passer dernier sous-prétexte qu'il était le Baron de Verchiel. Il regarda le visage de la jeune Milah pour connaître son avis par rapport aux paroles de son aînée et revint sur Dorianna. "Je suis chevalier Demoiselle, il est de mon devoir de vous protéger toutes deux." A ces mots le Baron devança Dorianna d'un pas, plus près de l'encadrement. Il se mit en position, se préparant à passer le premier afin de vérifier qu'aucun risque n'était présent. Il passa aussi vite qu'il le put et referma légèrement la porte par un habile mouvement tournoyant. Elle n'était certes pas assez fermée pour qu'ils soient protégés, mais cela pouvait faire l'affaire s'il n'y avait que peu de danger ou que les deux femmes puissent passer sans encombre juste au bon moment.

Le Baron de l'autre côté, fit signe aux deux femmes qu'il y en avait peut-être un et donc qu'il était nécessaire de faire attention, Uther vérifia en passant légèrement la tête pour revenir la coller contre le mur. Faisant signe d'attendre avant de passer. Si ce jeu n'était que pure invention, le chevalier souligna quand même que cela était un excellent entrainement et que le concept même de cette histoire devrait être reprise pour former les chevaliers, avec bien évidemment l'affrontement de deux camps et non de gnomes. Mais la n'était pas la question. Il fallait continuer le jeu et voir jusqu'où cela le mènerait. Étrangement, il pensa à sa propre mère qui pouvait à tout instant arriver comme celle des Thelvan et alors se demander ce qui pouvait bien se passer. Chose qu'Uther comprenait totalement, lui-même serait resté perplexe devant une telle scène.

Vérifiant de tout côtés, le baron attendait le bon moment pour que la première des deux femmes passent, c'était un travail précis et que le chevalier prenait très au sérieux. A la fois à cause de sa formation, mais aussi de ses valeurs morales qui étaient de défendre et de prendre soin d'autrui.

« Je suis chevalier Demoiselle, il est de mon devoir de vous protéger toutes deux. »

Alors que le Baron de Verchiel s’exécutait, Dorianna et Milah ne pouvaient qu’admirer les prouesses chevaleresques de leur hôte; le jeu d’Uther était parfait et rendait le scénario imaginé par Dorianna encore plus réaliste. Lorsque le jeune homme ferma la porte, les deux jeunes femmes retinrent leur souffle; le Baron était sauf. Un signe d’Uther avertit les sœurs Thelvan qu’il y avait fort probablement un terrible gnome derrière cette porte et qu’elles devaient être prudentes. Dorianna se tourna vers Milah. « Passez devant, chère sœur. Je surveillerai vos arrières… » murmura-t-elle. Milah prit un air faussement inquiet pour son ainée et passa devant elle, afin de rejoindre le Baron de Verchiel. D’un pas léger, Milah marcha devant la porte et lorsqu’elle fut près d’Uther, elle tendit les bras vers lui; il était le preux chevalier qui venait de la sauver des petites griffes difformes des gnomes imaginés par Dorianna. Jouer un jeu était une chose, mais si celui-ci pouvait servir à séduire le Baron, la jeune noble prendrait tout cela plus au sérieux.

Dès que Milah fut en sécurité auprès d’Uther, Dorianna sourit à tous deux et entreprit de passer devant la porte à son tour, en longeant le mur. Le jeu aurait pu avoir une tout autre tournure, si, à ce moment précis, la porte que venait de fermer le Baron ne s’était pas ouverte. Dorianna fut si surprise qu’elle bondit en arrière, se collant au mur qu’elle venait de laisser et ferma les yeux comme si elle craignait de voir apparaitre un réel gnome devant elle. Une éternité sembla s’écouler entre le moment où la porte s’était ouverte et celui où le responsable se dévoile aux joueurs; il s’agissait de Clara, la plus jeune des filles Thelvan, en compagnie d’Isabella, la plus discrète des enfants Thelvan. Toutes deux avaient quitté le repas plus tôt pour rejoindre leur jeune frère et la sœur du Baron, mais avaient visiblement changé d’idée et avaient décidé d’explorer la somptueuse demeure de Verchiel. Pendant quelques secondes, les deux jeunes femmes regardèrent Uther, Milah et Dorianna, les sourcils froncés, se demandant ce qu’ils faisaient puis, parce qu’elles connaissaient trop leur ainée, elles comprirent qu’elles venaient de perturber le déroulement d’un jeu imaginaire. Néanmoins, Isabella et Clara n’arrivaient pas à croire que Dorianna avait réussi à faire jouer le Baron de Verchiel et Milah; tous deux devaient être fiévreux.

« Votre Seigneurie, chères sœurs, quel plaisir de vous retrouver en vie! Ne soyez sans crainte, le dragon a été terrassé! » commença Clara, alors que Dorianna ouvrait les yeux sur ses jeunes sœurs, soulagé que ce soient elles et pas quelqu’un d’autre. « Clara, de quoi parlez-vous? Un dragon à Verchiel? Nous tentons de semer les gnomes diaboliques, les avez-vous aperçus? » rectifia Dorianna. À ces mots, Clara échangea un regard avec Isabella puis rapporta son attention sur son ainée. « Oui…les gnomes…et bien…en vérité, c’est la mort du dragon qui a réveillé ces créatures. Tuer un dragon était chose facile pour Isabella et moi, mais les gnomes, nous ignorons tout à leur sujet. Nous ne vous serons d’aucune aide pour vous aider à vous échapper, je le crains, mais j’ai toutefois un conseil pour vous; le chemin que vous suivez vous éloignera de ces créatures, mais vous risquez de tomber sur le mal en personne. ». Clara tourna les yeux vers Isabella et toutes deux éclatèrent de rire avant de tourner les talons. « Amusez-vous bien! ». Puis, aussi vite qu’elles étaient apparues, Isabella et Clara repartirent, laissant Uther, Milah et Dorianna à leur jeu.

Milah secoua la tête; le jeu devenait ridicule. Elle plongea alors son regard dans celui d’Uther pendant que, de son côté, Dorianna les rejoignait. « Votre Seigneurie, ne devrions-nous pas abandonner cette quête? Vous avez entendu mes sœurs, nous avons semé les gnomes et nous risquons de rencontrer le mal en personne. Je propose que nous fêtions cette victoire… ». Milah s’interrompit et regarda Dorianna qui, visiblement, n’avait pas envie d’arrêter de jouer. « …Dorianna pourra rester ici, afin de surveiller l’arrivée des gnomes et de donner l’alerte! Après tout, elle connait ces créatures mieux que quiconque! ». La jeune noble prit la main droite du Baron entre ses doigts délicats et poursuivit : « Venez, votre Seigneurie. ».

Uther fut sans aucun doute autant surpris que n'importe qui lorsqu'il vit la porte s'ouvrir. Voilà quelque chose qu'il n'avait pas prévus. Une situation délicate et légèrement embarrassante. Il aurait aimé qu'il en soit autrement, cependant il fallait faire face à la réalité les deux autres sœurs de Dorianna et de Milah avaient surpris le petit groupe en plein histoire inventée. Cela dit, même celles-ci avaient jouées au jeu de Dorianna de manière un peu dérisoire, mais il fallait bien admettre qu'il était rare de voir un esprit de jeu aussi atypique dans la noblesse Orlésienne.

Les deux sœurs avaient signalé la mort du dragon, là où Dorianna avait répliqué qu'il ne s'agissait pas de dragon, mais de gnomes. L'invention de la jeune noble ne semblait pas surprendre les sœurs de celle-ci, mais amusait, voir blaser pour certaines. Cependant, Uther n'aurait sans doute pas le loisir d'observer jusqu'où pouvait aller Milah pour tenter de gagner le Baron à sa cause.

Voilà qu'un nouveau dilemme apparaissait au Baron. Milah voulait clairement faire revenir sur le réel et non l'imaginaire afin de séduire et peut-être avoir la chance de devenir Baronne. Cependant, Dorianna n'était pas de cet avis, cela se voyait clairement sur son visage. Uther n'était pas à l'aise dans cette situation, les choix il en faisait tous les jours pour des problèmes nécessitant une réponse concrète et pragmatique. Ici il s'agissait d'une décision comme le chevalier n'aimait pas, une décision digne du noble jeu. Un autre divertissement de noble qui était mortellement dangereux, mais où chaque parole, chaque verre bu représentait un indice laissé à une petite mouche prête à tout pour montrer dans la hiérarchie sociale et vous faire perdre la tête.

Le chevalier regarda Dorianna et stoppa délicatement l'avancé de Milah qui avait commencé à le tirer loin de l'aînée des Thelvan.

- Je pense, qu'on ne laisse personne derrière. Demoiselle Dorianna, souhaitez vous venir avec nous afin de fêter la victoire ? Vous pourrez nous conter la façon dont vous avez eu connaissance de ces créatures et comment les vaincre si elles réapparaissaient. Qu'en dites-vous ?

Cela semblait être le parfait compromis pour inciter Dorianna de continuer à jouer et positionner Uther dans son élément désormais imaginaire. Et puis cela pouvait contrarier la jeune Milah, ce qui bien sûr serait assez amusant du point de vue du Baron. Faire en sorte que rien ne se passe comme l'autre le prévoyait, fut sa première leçon du noble jeu. Comme quoi, dans chaque divertissement, le noble jeu prenait sa place et tout son sens.

« Je pense qu'on ne laisse personne derrière. Demoiselle Dorianna, souhaitez-vous venir avec nous afin de fêter la victoire ? Vous pourrez nous conter la façon dont vous avez eu connaissance de ces créatures et comment les vaincre si elles réapparaissaient. Qu'en dites-vous ? ». Dorianna pouvait sentir la frustration de sa jeune sœur alors que le Baron de Verchiel refusait de partir seul avec elle. Milah voulait saisir la chance que Dorianna ne semblait pas voir; une opportunité de séduire l’un des hommes les plus influant de Thédas et ainsi, devenir Baronne de Verchiel. L’ainée Thelvan savait très bien ce que désirait sa mère; il y avait quelques années, Dame Thelvan avant tenté de négocier un mariage entre elle et le Baron, mais ce dernier avait refusé et c’était maintenant la deuxième fois que Dorianna jouait la monnaie d’échange pour le nom de sa famille. Bien que Uther de Verchiel était un homme charmant et doté d’une capacité à s’amuser, ce qui n’avait rien pour déplaire à la jeune femme, elle se refusait catégoriquement de satisfaire les désirs de sa mère et Milah semblait si enclin à réussir là où Dorianna refusait de jouer, que cette dernière ne pouvait que laisser la place à sa jeune sœur.

La jeune femme regarda successivement le Baron et Milah puis, tout doucement, se pencha pour déposer ses souliers au sol et y glisser les pieds. Lorsque ce fut chose faite, Dorianna leva les yeux vers Uther et lui sourit sincèrement. « Je vous remercie, votre Seigneurie, du plus profond de mon cœur pour cet instant ludique, mais il y a un temps pour jouer et un temps pour les choses sérieuses. Bien que ce second temps soit d’un ennui mortel pour moi, je crois que je vais vous laisser, Milah et vous, en profiter pleinement. » L’ainée Thelvan s’inclina légèrement en baissant les yeux et lorsqu’elle se redressa, elle aperçut un sourire démesuré illuminer le visage de sa jeune sœur. Le cœur de grande sœur de Dorianna fut heureux de voir Milah si heureuse et elle tourna les yeux à nouveau vers le Baron. « Votre Seigneurie, Milah, nous nous retrouverons bien assez rapidement…pour de nouvelles aventures… » ajouta la jeune femme sur un ton amusé.

Tout doucement, Dorianna fit tourner sa gracieuse silhouette et s’éloigna de deux jeunes gens, dans la direction qu’ils venaient de parcourir pour se sauver des gnomes diaboliques. Après avoir parcouru quelques pas, Dorianna tourna la tête par-dessus son épaule et dit : « Prenez garde au mal en personne dont parlait Clara, notre mère ne doit pas d’être d’humeur joyeuse pour être ainsi qualifiée… ». Puis, en se retournant, Dorianna eu un sourire moqueur et accéléra le pas pour ne rien entendre des reproches de sa sœur qui serait fort probablement outrée de l’entendre parler ainsi de Dame Thelvan devant leur hôte.  

« Votre Seigneurie… » Souffla Milah d’une voix tremblante; Dorianna allait payer très chèrement cet écart de conduite…

Spoiler:

Uther senti de la déception naître en lui. Pas forcément provenant de la jeune noble Dorianna. Mais bien de ne pouvoir passer plus de temps à penser à autre chose, jouer un autre rôle qui lui convenait. Il se sentait plus chevalier que Baron. Avec ce petit jeu il avait pu jouer le rôle qu'il appréciait plus que tout. Peut-être aurait-il du rester à l'académie et y enseigner à son tour et non rentrer pour réclamer son titre, mais son héritage l'avait rappelé, " Les de Verchiel doivent tenir la ville, contre la tempête et l'enclin s'il le faut." avait un jour déclaré son père. Il avait donc senti dans ces paroles une mission sacré, celle de protéger et diriger Verchiel même si cela ne lui plaisait guère.

Déjà, le chevalier pouvait sentir la joie naître en la jeune Milah, elle était très belle, il n'y avait aucun doute. Cependant, il aurait discuté avec Dorianna, non qu'il avait une quelconque idée dans un futur avec elle, mais l'envie de voir où l'étonnante imagination de la jeune femme pouvait aller. Le ton d'au revoir de la jeune Dorianna n'était pas sans rappeler qu'ils se retrouveraient bien assez tôt pour vivre une nouvelle aventure. Cependant, il faudrait éviter Dame Thelvan que Dorianna traitait de monstre. Cela fit rire Uther. Elle n'était visiblement pas comme toutes les autres Nobles.

Milah entraîna donc le Baron dans une salle où ils purent s'asseoir et boire à leur convenance. La jeune femme ne semblait pas posséder la passion pour l'invention de sa sœur. Mais elle maîtrisait bien d'autres atout. Il fallait lui reconnaître un art pour la parole et la séduction. Si le cœur du chevalier n'avait pas été pris il aurait sans aucun doute céder à cette charmante femme, mais sa fidélité prenait le pas sur tout. Celle qu'il aimait n'était certes pas noble, mais il l'avait choisi. Peu importe les mariages arrangés, peu importe les intérêts, il accomplissait déjà une tâche d'importance qui n'était qu'un fardeau. Il apprécierait de ne pas avoir à se sacrifier plus encore pour son nom. Il voulait se battre pour les villageois et paysans sur ses terres et pour eux, rien ne changerait quelque soit l'épouse qu'il choisirait.

La discussion fut fort longue avec la jeune Milah qui dura jusqu'à une certaine heure où ils rejoignirent la famille une nouvelle fois pour un nouveau repas, un nouveau défi. Suite à cela Milah profita encore de quelques moments avec le Baron. Cela ne dérangeait guère Uther qui appréciait parler, mais qui ne partageait pas les désirs de la jeune Thelvan.

Durant les jours qui suivirent le Baron eu la possibilitée d'accorder le défi que le jeune Albert avait demandé, des épées d'entraînements avaient été données pour l'occasion. Ainsi qu'un gabinson fait pour la taille de messire Albert. Le chevalier avait bien évidemment feint sa défaite, félicitant le garçon et l'encourageant à partir plus tard pour l'académie des chevaliers, vantant le mérite qu'il aurait ainsi que la grande famille qu'il rejoindrait.

Au jour de leur départ, Milah était venu spécialement voir le Baron pour lui annoncer quelle joie ce fut pour elle de faire ce trajet et de le rencontrer, chose qu'Uther retourna bien gentiment en annonçant qu'il avait également apprécié ce séjour qu'il espérait un jour voir cela se refaire. Le jeune Albert l'avait salué, sans promesse d'aller à Val Royaux, mais le noble faisait confiance à l'enfant, s'il ressemblait à son aînée Dorianna il partirait pour devenir chevalier Orlésien. Justement cette dernière était venue également taquiné le Baron et lui faire ses aux revoir. Lorsque ce fut le tour de Dame Thelvan et son époux, le chevalier laissa sous-entendre qu'une alliance avec leurs deux maison serait possible, qu'Elisabeth et Albert semblaients'entendre convenablement et que lorsque les deux enfants auraient atteint l'âge il serait possible de les promettre l'un à l'autre.

Ainsi la famille Thelvan s'en alla, sans la promesse du Baron de se marier à l'une des filles Thelvan, mais d'unir sa demi-sœur à leurs fils. Une victoire ? Plutôt maigre, mais une victoire inattendue tout de même. Le futur annoncerait surement d'autres changement ou événements, ainsi l'avenir était incertain...