« Vous rigolez, Père ? » Dis-je les sourcils écarquillés sans m’empêcher de décrocher un léger sourire, mal à l’aise. Il m’observe un moment, dans un silence ecclésiastique, puis récupère ses feuilles trainant sur son bureau pour les joindre.
« …Mère ?» continué-je, le sourire assombri. Elle fixe le sol toute aussi silencieuse, comme si la réponse se cache entre les fines lattes en chêne noir, quelques parts par là.
« Tu iras à Orlais, saluer la nouvelle impératrice… » Dit-il comme-ci de rien n’était. Mais il y avait quelques choses. Tout, ma naissance était supposée être le fruit d’une généalogie parfaite : Je suis un descendant des rêveurs à qui Dumath à tout appris - Je suis l’arrière petit fils des magisters qui parlaient aux anciens Dieux - Je suis un Altus et pas le petit Altus d’une lignée de dégénérée,  mais bien l’une des plus respectée de Tevinter ! Sans réfléchir davantage, la gorge en feu, j’interromps père sèchement « Mère, je vous en pris, répondez-moi ! Est ce vrai… ?Mon véritable père est… est un vulgaire esclave ?! »

Je sens le poing de Père se serrer. Démon - j’ai coupé son élan, des gifles des baffes, que dis-je l’apaisement pour ce manque de respect. Enfin c’est ce qu’il aurait fait si j’étais son fils, j’ignore maintenant quel châtiment cela serait. Quand tout d’un coup, stoïquement, Mère se lève. Nous sommes suspendus par ses pas interminables se dirigeant vers les fenêtres des jardins. Ses talons raisonnent alors comme un marteau sur son enclume. On aperçoit le reflet de ses yeux perdus dans le passé donnant finalement vie à ses lèvres, gercées par le froid des vents côtiers. Elle murmure lentement :

« Cela n'aurait jamais du être découvert. J’avais tout fait, insiste t’elle, pour que ce secret ne soit jamais dévoilé. Quand je suis tombée enceinte, Octavius, c’était comme ci le Créateur m’avait fait réalisé d’un coup toute l’idiotie, toutes les conséquences de mon acte. Crois moi je n’ai pas vécu une nuit sans redouter ce jour. J’étais tellement prise de panique que j…-j’ai pris les choses en mains pour qu’il n’y est plus d’erreur. Seulement trahis  par les vulgaires brouillons qu’une sorcière à l’eau de rose ne pouvait se résoudre à détruire. » Elle ne put s’empêcher de se griffer les phalanges avant de se retourner pour me regarder droit dans les yeux. Je vois sur son visage une fragilité déconcertante. La voix froissée elle continue « J’aurais aimé le savoir. Au moins pour toi, je te dois bien cela mais… » Elle prend une pause, faisant mine de réfléchir. Elle finit par agiter la tête les yeux humides. « Je ne peux pas. Je ne sais pas. » .



Ma gorge me brûle, cette fois-ci plus de la même ardeur. Je déglutis mais ma salive reste bloquée dans ma gorge, comme ci je n’arrive plus à ingurgiter quoi que soit de plus.  Je réalise avec horreur que c’était donc vrai, enfin possiblement vrai. Peut être que l’ignorance est pire que la vérité. Cela n’a plus d’importance de toute manière. Qu’est ce que je suis censé faire maintenant ? J’avais pourtant si bien réussi jusqu’à présent, j’étais sur la bonne voie, père lui même m’avait appris l’art occulte de la magie du sang, cela voulait bien signifier quelques choses ?! J’étais parti pour être Magister et j’avais travaillé dur pour l’être, mais ses rêves m’ont été refusé avant même ma naissance, quel sens de l’humour Créateur.

J’observe père, j’ai toujours su que mes parents n’étaient pas amoureux, leur idylle était loin d’avoir commencé dans un coup de foudre où leur regard c’était croisé dans une ruelle bourgeoise. C’était plutôt signez ici et là, voilà, félicitation vous avez acquis telle terre, il y a un très beau moulin, il remonte au premier enclin, je ne vous en ai jamais parlé de notre moulin aux lac du Sorcier Blanc, il vaut le détour croyez moi. Enfin Vous vous doutez bien que c’est une dote très pauvre. Mais ici à Tevinter une seule chose est plus importante que la richesse, l’influence ou la magie. La pureté du sang. Bon nombre de sudistes trouvent ça idiot, et ils ont peut être raison. Mais chez les tevintides les plus conservateurs cela dépasse la raison, le sang pur offre tout. C’est notre orgueil de garder ce qui un jour avait tant fonctionné, un espoir de retrouver la puissance de jadis. A en oublier les défauts comme nous l'a si bien montré dans l’histoire notre très chère Andrasté. Si je ne suis pas son fils je ne mérite pas ma place dans cette maison et Père avait très bien compris cela. Je ne peux m’empêcher de me mettre à sa place, il a du réaliser toutes ses années de mensonge, il attendait beaucoup de moi lui aussi. La vérité n’a pas d’importance au final, c’est les possibilités elles-mêmes qui sont contraires à toute la théorie.

Je me tourne vers Père : « Qu’est ce qui va advenir de moi… ? » finis-je par dire la voix cassée. Sa réponse allait changer mon futur. Je ne suis pas naïf, continuer la vie comme si tout ceci était un mauvais rêve, n’est pas en option chez les Pavarati. J’essaye de prendre une respiration ample et profonde pour me préparer à sa réponse mais mes côtes semblent soudées. Mon cœur se presse contre ma poitrine.



Il soupire contrarié de cette situation, trouver une simple réponse tout en gardant les apparences n’allait pas être simple. Mais père n’est pas n’importe qui, il sait se sortir de situation bien plus épineuse. Son visage semble transformé,  il adopte la posture de l’inquisiteur, d’un ton froid il déclare « Je ne sais pas quoi penser de l’erreur de ta mère mais je réglerai ça avec elle. Je ne peux te considérer comme un dégât collatéral, Octavius. » Ca semble positif. « Tu as été mon fils, j’espère que tu le seras à nouveau. Mais n’attend aucune charité de ma part, tu n’es rien pour le moment. » Pas vraiment. « Tu iras à Orlais voir la nouvelle impératrice et la féliciter. Tu porteras notr-mon nom. Tu me représenteras à la cour en tant qu’ambassadeur. Ces marches d’exaltées ont… affaiblie certains partenariats avec le reste de Thédas dont la fortune des Pavarati en dépend. Je te donne une seule et unique chance, prouve moi tes capacités de magister, toi qui m’avait tant rendu si fier. A ton retour, je jugerai tes résultats, si elles sont suffisantes je saurai que tu portes ma chair. Un sang d’esclave n’a pas la prétention pour réaliser cette tâche c’est ainsi que cela fonctionne ici. Échoue, ridiculise ma position, et tu n’auras plus aucune existence à mes yeux, à ta mère, à notre famille pour toujours. Tu connais mes attentes, j’espère m’être fait comprendre. »

J’acquiesce. Un séjour au bal masqué, formidable.

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