Dans les couloirs étroits de la Tour, à la lueur des lanternes matinales, deux ombres courent sur les murs. Vacillantes, de guingois, comme poursuivies par l'Archidémon en personne, elles trébuchent sur les dalles irrégulières, se gaussent tel un duetto de bossus. L'éclat de leurs rires résonnent entre les pierres. "Allez, allez !" souffle son ami de toujours. Pressant, il le tire par la manche pour le guider dans sa course, lui qui entre les pierres ne savait trouver sa route. L'allégresse anime leurs visages enfantins. Dans leurs voix juvéniles, la jubilation de ceux qui transgressent l'interdit. Au loin, dans la troisième chambre de gauche après la porte du quartier des Templiers, les murs tremblent. Une voix, vociférante, perse le silence.

Il les appelait "les casseroles", peut-être était-ce dû à la douce mélodie de buffet à vaisselles accompagnant chacun de leur mouvement; ou à cette fois, quand il avait eu l'aubaine d'en entendre un pousser la chansonnette sur le Cantique de la Lumière, se croyant seul pour sa toilette. Il les aimait bien, malgré tout, les casseroles. Peut-être était-ce ce qu'on appelait du respect, ou ce sentiment étrange que les victimes peuvent avoir envers leurs bourreaux. Ils les voyaient comme des frères, parfois, comme des pères. Leurs gardiens, figures droites et inflexibles vers lesquelles on craint de se tourner.

Entre ces murs, immense labyrinthe effleurant le ciel, il n'avait guère à craindre que de se perdre.

Son corps embrassait la terre, cette herbe verte brillant d'un éclat éthéré. Il demeurait ainsi des heures durant, immobile, perdu au milieu des vergers luxuriants. Balayant de ses yeux le ciel teinté d'un éclat mauve, il en scrutait chaque parcelle, chaque détail avec minutie. Chacune des heures, minutes, secondes de sa vie, il voulait les passer ici, à sa place. Là où son corps n'était plus une limite. Là où chaque geste n'était pas un combat contre le monde. Cette enveloppe boiteuse, encombrante, pataude, il n'avait pas à la subir en ces lieux.

L'Immatériel était devenu son foyer, les créatures hantant ses rêves ses compagnons. Ses souvenirs. Il se délectait de ces images oubliées, effacées par le temps. Ces visages, ces paysages qui avaient peuplé sa vie et qu'il craignait de perdre. Tout demeurait ici, intact. Immuable. Les traits de sa mère, son père, ses frères, flous dans sa mémoire, les esprits savaient les frauder à la perfection. Ils en copiaient si bien chaque détail, jusque dans l'intonation de leurs mots, qu'il doutait parfois. Souvent.

Les nuits étaient devenues ses exutoires, il les chérissait. Les journées, elles, n'étaient que de longs couloirs sombres et sans saveur qu'il fallait traverser un à un. Impatient, il n'attendait que le dernier repas pour s'évader au plus vite de ce monde "réel" qu'il détestait.

Cinquante huit marches. Treize pas sur la droite puis vingts sur la gauche. C'est le chemin qu'il empruntait pour rejoindre la bibliothèque; un lieu qu'il ne côtoyait que par nostalgie et parce qu'Hiccup y passait le plus clair de son temps. Ça n'avait plus de sens maintenant, qu'il était parti, qu'ils étaient partis. Ceux qu'il avait connus, ici, dans cette même Tour, avec qui il avait grandi. Ils avaient fuit. Profité d'un soulèvement pour recouvrer leur liberté, un affranchissement qu'ils payeraient peut-être le prix fort. En valait-il la peine ? Sûrement. Lui était resté, las, et la vie avait repris son cours dans la Tour, plus enchaînée que jamais. Étouffant, le quotidien, tant des mages que des templiers, n'était plus régit que par la peur et la délation; les châtiments "d'exemple" devenus leur pain quotidien.

Amer, il tentait de réprimer sa colère; vexé, il étouffait sa jalousie. C'était idiot, il le savait. Il n'aurait jamais pu les suivre. Alors à quoi bon le lui proposer ? Il pouvait bien apprendre par cœur chacun des recoins de sa petite Tour, la connaitre sur le bout des doigts; mais le monde... ha, le monde.

✥ Il a découvert sa magie aux alentours de ses 8 ans, ignorant que les feux follets avec qui il conversait parfois étaient en fait créés de sa main. Ça n'a duré que quelques semaines jusqu'à ce qu'il soit surpris par un voisin alors qu'il jouait avec l'un de ces derniers. La nouvelle fit rapidement son chemin parmi les habitants du bas-cloître. Corrélation ou non, les vignes de la famille furent partiellement brûlées quelques jours plus tard. Les templiers, prévenus de l'éveil d'un jeune mage dans le bas-cloître, arrivèrent néanmoins avant que les choses ne dégénèrent réellement.

✥ Jain s'est brûlé les yeux à l'âge de 10 ans lors d'un exercice de magie. Devenu totalement aveugle, il a mis près de 6 ans à développer le savoir qu'il utilise maintenant. Il reste malgré tout incapable de voir physiquement les gens ou les choses et ne discerne que l'énergie liée à l'Immatériel qu'ils projettent. Il ne peut, à priori, pas discerner l'énergie d'une personne d'une autre tout comme théoriquement, il ne peut pas voir les nains. Depuis son accident, il passe un maximum de son temps dans l'immatériel, seul endroit où il recouvre la vue, allant même jusqu'à concocter des potions d'hypersomnie qu'il prend en cachette. Il réussi parfois, de plus en plus régulièrement à force d'entrainement, à faire des rêves lucides dans l'Immatériel, c'est à dire des rêves où il a conscience d'être en train de rêver et aura la possibilité d'exercer un contrôle délibéré non seulement sur ses actions mais sur le contenu du rêve et sur son déroulement.

✥ Le jour de sa confrontation, il a dû faire face à un démon de l'envie qui lui a promis de lui rendre la vue. Il a manqué de céder à ses avances; son rituel a d'ailleurs duré si longtemps que les templiers, alertés, songeaient à le tuer.

PSEUDO ☩ beulayte AGE ☩ 25 ans COMMENT AVEZ-VOUS DÉCOUVERT LE FORUM ? ☩ chez ta sœur 8D FRÉQUENCE DE CONNEXION ? ☩ tout le temps là telle une nolife CRÉDITS IMAGES ☩ beulayte

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